
Cocorico, c’est chez nous à HAUTERIVES, au cœur de la Drome que se situe ce monument hors normes. Il ne nous est pas inconnu, mais il faut bien convenir qu’en 35 ans, tout a bien changé dans ce village. Dans son écrin de verdure, le Palais Idéal en est maintenant le centre et l’attraction majeure. C’est avec plaisir que nous redécouvrons cet édifice unique en son genre, inscrit aux monuments historiques, le 2 septembre 1969.
Le rêve de Ferdinand Cheval.
C’est au cours d’une ses tournées quotidiennes d’une quarantaine de kilomètres que notre Ferdinand bute un jour contre une pierre de forme particulière. Et soudain sa vie bascule. Son rêve de bâtir un palais prend forme tout en poussant sa brouette pleine de pierres trouvées dans la campagne. Puis, il commence les dessins de son futur palais extraordinaire. Il n’a aucune formation artistique, ni formation en construction: qu’importe, il sera architecte et maçon.
L’œuvre de toute une vie.
C’est en 1879, à l’âge de 43 ans que Ferdinand commence à ériger en solitaire cette construction unique dans son jardin. Avec acharnement et volonté, il érige ses statues, construit des escaliers et une galerie, façonne des créatures étonnantes et laisse libre court à son imagination. Pour lui, le mot impossible n’existe pas, il n’a pas de limite. Son œuvre est achevée en 1912 ; Ferdinand a alors 76 ans. « 10 000 journées, 93 000 heures, 33 ans d’épreuves, plus opiniâtre que moi se mette à l’œuvre ».
- Peu de moyens.
Il monte son chef d’œuvre avec du ciment, du mortier ou de la chaux et intègre les pierres de toutes formes et de toutes origines collectées et accumulées tout au long de ses déplacements. Les échafaudages sont en bois et les outils rudimentaires, telles que cuillère ou fourchette ; ses mains sont ses meilleurs outils. Un vrai travail de titan. « Le soir à la nuit close, quand le genre humain repose, je travaille à mon palais. De mes peines nul ne saura jamais. »
- Les dimensions du Palais.
- Longueur 26 m
- Largeur 14 m
- Hauteur de 8 à 10 m
C’est vraiment une construction de belle taille.
Inspiration divine ou imaginaire débordant ?
A l’époque pas d’internet, pas de voyages à l’étranger non plus, mais alors d’où notre facteur tire-t-il son inspiration ? Si M. Gaudi trouvait de l’aide au moyen de champignons hallucinogènes, ce n’est pas le cas pour Ferdinand. L’explication est beaucoup plus terre à terre. C’est en regardant les cartes postales, les illustrations des magazines qu’il distribue et la nature qui l’entoure qu’il puise ses éléments de décoration et ses fabuleuses créatures. C’est ainsi que ses représentations symboliques, historiques ou mythologiques trouvent leur place avec nombre de citations.
Une curiosité architecturale.
Si nous devions qualifier ce palais de dentelle, que dirait-on ? Inclassable, unique, particulier, étrange, extraordinaire, fantastique, délirant, poétique, improbable, excentrique, naïf, curieux, …. C’est tout çà à la fois. En tout cas, on est interpellé par cet édifice né d’une obstination sans borne, peut-être obsessionnelle, d’un seul homme. Si le facteur Cheval est qualifié de « pauvre fou » un peu excentrique par ses concitoyens, il sera source d’inspiration pour de nombreux artistes venus visiter sa création.
Un rapide aperçu du Palais.
Il est composé de quatre façades : Est, Sud, Ouest et Nord. Une terrasse et une galerie complètent l’ensemble.
- Façade Est.

Ferdinand consacre 20 ans à la construction de cette façade de style baroque riche d’éléments. On y trouve entre-autres, les 3 géants : César, Archimède et Vercingétorix, ainsi que le palais hindou. Une niche est spécialement conçue pour abriter sa chère brouette. D’ailleurs, il y a bien une brouette, mais est-ce bien la sienne ?
- Façade Sud.
Cette partie, assez dépouillée est essentiellement constituée d’un musée anti déluvien où sont stockées les pierres servant à la construction.
- Façade Ouest.
Remarquable avec des alcôves abritant des monuments miniatures comme une mosquée, un temple hindou, un chalet suisse et même un château du Moyen-Age. Ici, cohabitent les styles de toutes les cultures ; le tout marqué de sa signature C H E V A L.
- Façade Nord.

Cette façade est très riche de détails et marque la fin de 33 ans de travail acharné. Elle impressionne autant pour sa diversité de sculptures que par ses citations reflétant l’état d’esprit de Ferdinand. On peut, notamment y lire « « Amis de la nature, mais de naissance obscure Ce qui rend souvent la vie dure Je l’ai subi sans murmure » et même « Un génie bien faisant m’a tiré du néant – Travail de géants il m’a placé dans ce palais charmant où l’hirondelle reviendra chaque printemps – Créature vient admirer ici la nature Tout ce que tu vois en passant est l’œuvre d’un paysan dessinée. »
- La galerie.

Ce n’est ni plus ni moins que le bestiaire de Ferdinand le long d’un couloir intérieur. Les bas-reliefs sont peuplés d’animaux où se côtoient pêle-mêle : dromadaire, éléphant, ours, loup, chat,… Une multitude de coquillages et d’oiseaux ornent les murs.
- La terrasse.
C’est ici que trône la fameuse « pierre d’achoppement » de Ferdinand, sa source d’inspiration ; celle avec qui tout commence. Et tout en hauteur, la tour de Barbarie entourée de figuiers et d’aloès domine la galerie.
Une dernière construction.
Ferdinand souhaitait être inhumé dans son palais, mais cela lui a été refusé. Qu’à cela ne tienne, à 78 ans, il construit son propre « tombeau du silence et du repos sans fin » dans le cimetière communal. 8 années de labeur sont nécessaires pour achever cette dernière œuvre où il repose maintenant, après son décès en 1924.
Que l’on aime ou pas ce palais, il faut bien reconnaitre que l’on ne reste pas indifférent devant l’obstination et l’opiniâtreté d’un seul homme à réaliser son rêve. Chapeau bas, M. CHEVAL !


