Les falaises de sable rouge de Bayanzag, communément appelées « falaises enflammées », « falaises flamboyantes » ou « flaming cliffs » à l’international, sont depuis plusieurs années devenues un incontournable de Gobi, à 100 km environ au nord-ouest de Dalanzadgad, et 600 de la capitale.
Il y a plus de 70 millions d’années, cette plaine n’avait pas les traits aussi désertiques qu’on lui connaît aujourd’hui, mais ressemblait plutôt à une forêt tropicale humide dans laquelle vivaient nombre de dinosaures. Ce sont d’ailleurs eux qui, indirectement, ont rendu le site aussi célèbre. En 1922, le paléontologue américain Roy Chapman Andrews fut le premier à y découvrir des os, mais surtout des œufs de dinosaures dans ces falaises de sable sédimentaire. Ces découvertes attirèrent les yeux du monde entier. Les nôtres aussi.
On pourrait donc s’imaginer suivre ici les traces de ces géants du secondaire, mais il n’en est rien puisqu’on n’en voit plus la trace, bien que la rumeur semble indiquer le contraire. Quelques babioles sur les étals à l’entrée du site à l’image de ces colosses d’un autre âge, nous rappellent qu’en ces lieux se jouait le théâtre d’un monde qui nous est encore méconnu. Il n’y a plus fouilles, les dinosaures s’en sont allés. L’intérêt désormais est ailleurs, devant nos yeux.
Au départ on n’a pas vraiment senti le coup venir. Midi passé et le cahot du van sur la piste qui s’approche dangereusement des Flaming Cliffs. On se regarde, on s’interroge. « Tu vois là-bas? Ça y ressemble, non? » « Attends, mais on va où là? » « Vont quand même pas nous débarquer sur site à cette heure-ci? » Chaleur écrasante, un soleil au zénith aux rayons d’une blancheur saisissante, je caresse déjà mon appareil. Toi, mon ami, tu vas devoir faire des miracles, moi, j’en ai pas le goût. Aveuglé devant comme derrière mon objectif je ne remarque pas les promesses d’une falaise à l’érosion perlée d’un orange encore timide devant moi, et bientôt sous mes pieds. Un pas et c’est le vide. Un pas, et c’est la chute. Mais mon aventurière me rattrape.
« En tongs ça le fait pas. Sans crème indice 2000 ça le fait pas. Sans 3 litres d’eau ça le fait pas. Sous 75° ça le fait pas. JP! j’y vois rien j’ai la rétine de l’œil gauche qui fond… »
« Oui, ça le fait pas, j’ai compris. T’façon, moi aussi ça me fait chier, j’ai pas envie de crever là et ça va rien rendre en photo. »
Un écueil supplémentaire dans l’organisation du trek qui ne nous a toutefois pas empêchés de revenir 5 heures plus tard. Ce panorama méritait bien de se parer de ses plus beaux atours, et d’une élégante luminosité, moins agressive, plus douce. Et là, enfin, un relief à l’ocre rouge se dessine à mesure que s’estompent les rayons du soleil, mais il est encore haut. Plus tard, les falaises brûleront, il faut d’ores et déjà en profiter. Plus tard, quand les falaises s’enflammeront, nous ne serons plus là pour les voir.
Allez-y avant le coucher du soleil, vous vivrez quelque chose de géant.
Quelques mots pour conclure sur le saxaoul (ou saxaul), un arbuste endémique d’Asie Centrale et plus particulièrement de Mongolie. La bande vert plus sombre sur la photo du dessus, c’est justement une forêt de saxaouls. Bayanzag (qui signifie «riche en saxaoul») est un endroit parfait pour les observer. On dit qu’ils restent toujours verts, qu’ils mettent un siècle environ pour atteindre une hauteur de 4 mètres, et j’ai eu la chance d’aller me balader au milieu de ceux de cette espèce comptant parmi les plus majestueux, à quelques dizaines de mètres seulement de notre ger (yourte). J’ai pris mon appareil en pensant faire de belles photos.
Je n’ai jamais ouvert mon boitier.
Sur place, une impression de ras-le-bol et de dégoût, exacerbé probablement par un camp déjà dépassant les limites du supportable. Un lieu d’aisance au beau milieu d’une décharge sous l’ombre d’un feuillage malmené par le vent. Le silence coupable de l’incartade. Pas un bruit, sinon celui des mouches.
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