Après notre périple moto au Ladakh, nous prolongeons notre séjour en Inde en ajoutant une extension pour visiter le Rajasthan et ses principales capitales. C’est donc un voyage sur mesure que nous faisons, avec un chauffeur guide. Nous partons de Manali en passant par Amritsar (Penjab), pour arriver à Bikaner aux portes du Rajasthan. Les temps de déplacements sont variables, mais il faut bien avouer que l’état des routes rend les trajets un peu longs.
Surprises sur la route.
Compte tenu des conditions de circulation dans ce pays, il faut oublier la location de voiture. A moins d’être suicidaire, c’est tout simplement impossible. Même avec un chauffeur local expérimenté, nous avons cru mourir à plusieurs reprises et c’est passé, parfois, à un cheveu. On trouve de tout sur la route, des chevaux, des dromadaires, des ânes, des buffles, et un certain nombre de camions, charrettes, parfois en contresens. En ville, les piétons, les motos, les tuks-tuks, effectuent des chassés croisés périlleux pour se faufiler, tant la circulation est dense. Il faut avoir des yeux tout autour de la tête pour tenter de traverser une route. On ne s’y fait pas, on subit. Il y a beaucoup monde, très nettement indiscipliné, et les accidents sont fréquents. Cela dit, nous n’avons eu aucun problème, juste quelques belles frayeurs.
Tout le monde nous a vanté le Temple d’Or et nous avons hâte de le contempler de nos propres yeux. Ce sera donc notre toute première visite.
Le temple d’or d’Amritsar.
Ce lieu sacré des Sikhs est vraiment incontournable en Inde. Comme dans tous les temples, il faut avoir un foulard sur les cheveux, être pieds nus et laisser ses affaires personnelles en consigne. Le temple est entouré d’un bassin rempli d’eau sacrée l’étang du nectar. Son toit recouvert de 400 kg de feuilles d’or étincelle sous le soleil. Tout est en marbre blanc immaculé. L’ambiance est paisible, sereine et douce. On se sent bien loin de l’agitation de la ville.
Une énorme cantine.
Nous mangeons sur place avec la population locale qui se presse ici quotidiennement pour un repas gratuit. Tout le monde est accueilli sans distinction de caste ou de richesse et vient s’asseoir sur de grandes nattes dépliées sur le sol, dans de grandes salles. On nous remet un plateau repas en fer que l’on pose sur ses genoux. Plusieurs personnes passent ensuite et vous servent directement (soupe de légumes, lentilles, galette de pain et riz au lait). L’accueil est chaleureux et respectueux. Nous vivons là une belle tranche de vie dans la simplicité, sous le regard un peu amusé, mais bienveillant de nos hôtes. Tout le monde a bien remarqué que les plats très épicés n’étaient pas tout à fait notre tasse de thé et que nous chipotions tout en faisant bonne figure.
Cette soupe populaire fonctionne en continu. En sortant, nous passons dans les cuisines. C’est époustouflant. Nous n’aurions jamais imaginé autant d’assiettes, de plateaux, de couverts et de marmites géantes. C’est une véritable fourmilière qui œuvre dans les coulisses pour assurer des milliers de repas par jour.
Pas moins de 500 km nous attendent pour rejoindre Bikaner, notre prochaine destination. C’est une longue étape. Les villages se succèdent et se ressemblent. Ils sont tous très pauvres. On peut faire un copier/coller d’une étape à l’autre et d’une ville à l’autre. La misère est partout.
Le fort de Junagarth de Bikaner.
C’est une immense citadelle où l’on trouve des cours intérieures, de très belles salles richement décorées, des couloirs et des terrasses. Nous sommes touchés par une plaque représentant des empreintes de mains. En fait, cela fait froid dans le dos. Ce sont celles des femmes de haut rang qui se sont immolées sur le bûcher funéraire de leur époux. La femme vertueuse (Sati) doit suivre son mari dans la mort souvent sous la pression de proches, de brahmanes ou sous l’emprise de drogues. Cette barbarie est fort heureusement abolie.
Nous descendons jusqu’aux portes du désert du Thar. Ici, les paysages sont arides et les quelques chèvres que nous croisons ont peu de verdure à se mettre sous la dent. Faute d’herbe, les vaches mangent dans les tas d’ordures tout ce qu’elles trouvent ; cela va du plastique au carton et les animaux sont maigres à faire peur.
Commençons notre palette des villes colorées d’Inde avec la ville dorée.
Jaisalmer : la ville dorée.
Elle est ainsi nommée pour la couleur de ses pierres en grès jaune. C’est une forteresse impressionnante et la terrasse du palais Raj Mahal, offre un beau panorama sur le désert, la vieille ville et les temples jaïns. Ce fort construit sur une colline est aujourd’hui menacé d’effondrement par les eaux d’écoulement des hôtels. Il faut donc limiter sa consommation d’eau pour préserver le lieu.
Nous apprécions beaucoup la vieille ville avec son bazar, mais surtout les havelis (riches demeures de marchands) dont les façades sont de vraies dentelles. C’est un labyrinthe de petites traboules où les vaches n’hésitent pas à vous pousser si vous êtes sur leur passage, pour le plus grand plaisir des Indiens réjouis. Heureusement que leurs cornes sont coupées, sinon le postérieur de Bernard en aurait fait les frais.
Le soir, nous soupons dans une gargote au pied de la forteresse pour profiter de la gastronomie locale. La cuisine est cachée derrière un muret et l’on entend les légumes frire dans la poêle avec le cuistot qui chantonne. Tout est très bon et le cuisinier est ravi de voir les assiettes vides. Nous demandons à goûter le lassi, sorte de yaourt fermenté que l’on sert nature ou aromatisé avec des fruits. C’est un régal et le patron heureux que nous apprécions, nous l’offre gentiment. Côté bière, un un peu plus compliqué puisque officiellement, elle ne se vend pas. Mais comme par magie, on nous en amène une discrètement emmitouflée dans du papier journal avec pour consigne de la laisser par terre, à l’abri des regards. Finalement, tout est possible, tout est réalisable.
Si vous êtes dans les parages, faites un détour ou poussez un peu, vous ne serez pas déçus par cette forteresse qui le vaut bien.
Nous demandons à notre chauffeur de nous conduire à une dizaine de kilomètres de la ville pour visiter deux sites qui nous tiennent à cœur.
Bara Bath, mais qu’est-ce donc ?
Ce sont des monuments funéraires ou cénotaphes royaux majestueux, en pierre ocre. Il règne dans ce lieu une grande sérénité et nous sommes hors du temps, malgré quelques éoliennes assez proches. L’architecture de ces tombeaux est fascinante avec ses coupoles et ses arches arrondies, qui apportent une grande harmonie à l’ensemble.
La seconde visite est pour la cité fantôme de Kuldara ; elle n’est pas loin, à environ une dizaine de kilomètres et nous allons y rencontrer son gardien Sumar.
Jodhpur.
Nous la connaissons tous, sous le nom de ville bleue. Cette appellation de la ville vient de la couleur des anciennes maisons bleues appartenant aux membres de la caste des brahmanes. Elle porte aussi le nom de ville soleil, en raison de l’exceptionnel ensoleillement qu’elle connait tout au long de l’année.
Le fort de Merangarth.
Cette forteresse dégage un sentiment de puissance. Beaucoup de salles se succèdent et comme dans presque tous les palais, elles sont richement décorées. La collection de palanquins est remarquable. Ici, tout est démesuré et les façades sont de vrais chefs-d’œuvre, tout en dentelle de pierre.
Dans ce fort, de grandes pièces à la décoration façon mille et une nuit nous ont éblouis. On imagine bien Shéhérazade alanguie sur des coussins racontant des contes au Calife, pour ne pas être exécutée. Du haut des remparts, la vue sur la ville est imprenable. Nous donnons une mention spéciale pour cette visite riche de collections et de décorations intérieures exceptionnelles.
Avant de nous rendre à la dernière ville colorée manquant à notre palmarès, nous passons par Pushkar, une ville incontournable pour les Hindous et qui ne ressemble à aucune autre. Et maintenant, prêts pour découvrir la ville rose ?
Après la dorée et la bleue, voici la ville rose.
Jaipur.
Elle tire son nom de cette couleur qui recouvre tous les murs de la vieille ville. Il est, bien sûr, obligatoire de passer devant le palais des vents (Hawa Mahal). Cette grande façade de 5 étages est impérieuse avec ses 953 fenêtres et niches de très belle architecture. C’est une visite rapide, juste le temps de faire une photo sans se faire écraser, car il y a peu de recul pour la prise de vue. Quant à l’espace de Jantar Mantar, l’on se sent un peu petit à côté d’immenses appareils d’astronomie. A notre sens, cette visite vaut uniquement le détour pour ces instruments hors normes. Nous ne sommes pas vraiment conquis.
C’est un pur hasard. Le jour de notre visite au City Palace correspond à la fête des touristes. C’est inattendu et fort agréable d’être accueilli avec un collier de fleurs, des pâtisseries et des chants.
Le City Palace.
Deux jeunes filles nous abordent pour faire la causette. L’anglais et le français se mélangent et créent des quiproquos qui nous font bien rire. Elles sont très contentes de bavarder avec des étrangers et nous ne boudons pas notre plaisir non plus.
Ce très beau site mérite vraiment que l’on admire toutes les splendeurs intérieures que l’on découvre à chaque détour. Il faut simplement prendre le temps d’en profiter. C’est aéré, la couleur rose est reposante et l’architecture a beaucoup de cachet. Deux jarres immenses en argent (les plus grandes du monde) sont exposées. Musées, cours intérieures et jardins vous attendent dans la partie du palais ouverte aux visiteurs.
Poursuivons. Notre prochaine étape sera le Fort d’Amber. Nous l’apercevons depuis la route et nous avons hâte de découvrir ses trésors. Qu’y a-t-il à l’intérieur ? Pour le savoir, il faut y aller. Ce sera donc une petite montée sous un soleil de plomb en début d’après-midi.
Le fort d’Amber.
Les salles qui se succèdent sont riches et impressionnantes avec des sculptures de fleurs dans les bas-reliefs, des incrustations dans le marbre blanc, des peintures murales et des mosaïques. C’est un ravissement permanent, sans cesse renouvelé. Une fontaine en étoile apporte un peu de fraîcheur et ses jardins, une touche verte colorée. Ce site est immense, mais un sympathique garde nous pilote dans les méandres de ces bâtiments en nous montrant les curiosités insolites des occupants des lieux. Les chauves-souris, la tête en bas comme il se doit, les essaims d’abeilles énormes et gentiment suspendus dans un endroit inaccessible ou les peintures quasi invisibles, si l’on ne sait pas où elles se trouvent, il nous montre tout. Nous passons un bon moment avec notre guide improvisé qui n’a pas manqué de nous faire son plus joli salut militaire. Repos !
Et hop, soyons fous, nous tentons un petit tour à dos d’éléphant. Notre conclusion est sans appel, c’est tout simplement un peu tape U (pour rester polis) et très inconfortable. Notre éléphante parée de belles peintures vives avait le bel âge de 33 ans. C’était, paraît-il, une petite jeunette. Et puis, il vaut mieux ne pas passer derrière elle quand elle a une envie pressante. La chemise et le pantalon de notre guide ont été bien arrosés, et ce n’était pas un petit pipi d’oiseau !
La fin de notre voyage approche et nous nous dirigeons vers Agra pour découvrir ses trésors. Ici nous attendent le fort rouge et le Taj Mahal qu’il nous tarde de voir aux premières lueurs du soleil. Encore une petite nuit en perspective.
Agra et ses trésors.
le fort rouge et ses palais de marbre blanc.
C’est le plus grand de l’Inde et il est classé au patrimoine mondial de l’Unesco. On y trouve des jardins, des mosquées et des palais de marbre blanc somptueux.
Ici, l’on se promène à son rythme, tranquillement sans être bousculés. L’architecture est magnifique avec des voûtes, des colonnes, des pierres précieuses incrustées dans le marbre. Cherchez bien, sur la terrasse d’un des palais, vous pourrez voir le Taj Mahal de dos, dans la brume.
La perle de l’Inde : Le Taj Mahal.
Un pur joyau.
C’est une merveille de blancheur et d’harmonie, symbole d’un amour éternel. Nous sortons du lit aux aurores, pour assister au lever du soleil sur cette splendeur. Après les contrôles d’usage, nous passons une première porte gigantesque et là, nous restons interdits devant la vision qui s’offre à nos yeux. Le mausolée en marbre blanc, recouvert d’un dôme est encadré par quatre minarets. Il change de couleur en fonction de la luminosité du jour et se reflète dans un bassin qui lui fait face. Il règne dans ce lieu une atmosphère de grande quiétude et de recueillement. L’ensemble est d’une beauté incomparable à couper le souffle. C’est réellement prodigieux.
Allons voir de plus près.
Nous mettons des protections sur nos chaussures pour approcher du tombeau, c’est obligatoire. Des arabesques florales d’une finesse incroyable ornent le monument. Les fleurs sont réalisées avec des morceaux de pierres précieuses ou semi-précieuses de couleur s’emboîtant et s’assemblant parfaitement les unes dans les autres, sans joint. Les bas-reliefs sont également à motif floral. L’ensemble est à la fois simple et très riche. La hauteur des édifices est étonnante et nous sommes vraiment petits, à côté.
Oublié l’heure du lever matinal ! Oublié la file d’attente ! Il ne reste que l’émotion qui nous saisit devant tant de pureté. Les mots sont un peu réducteurs pour exprimer tant de saisissement devant cette architecture extraordinaire, il faut vivre cette expérience unique.
Ici aussi, beaucoup de jeunes femmes demandent à être prises en photo avec nous. Sur ce site, pas moins d’une quinzaine de personnes nous sollicitent. Pour nous remercier un jeune couple nous a dit we love you. C’est touchant, sincère et surprenant. Très franchement, on ne sait plus où se mettre. Nous ne sommes pas habitués à tant de spontanéité et de chaleur. Les parents ne sont pas en reste et demandent également des photos avec leurs enfants. Nulle part ailleurs, nous n’avons eu de souvenirs aussi authentiques. Il suffit de fermer les yeux pour revivre chacun de ces moments rares, emprunts de forte émotion. Ils vont droit au cœur et réchauffent l’âme.
Un bilan très positif.
Pas facile.
Et pourtant, nous constatons partout le dénuement dans lequel se trouve la population indienne. Nous avons presque l’impression de reculer dans le temps. Les charrettes sont tirées par des ânes, des chevaux et même des dromadaires. Les cultures, en dehors des plaines désertiques proches de Jaisalmer sont diverses et variées. On trouve du riz, de la canne à sucre, du millet, du coton et beaucoup de rizières dans le Penjab.
La chaleur, le bruit, les odeurs et la surpopulation nous agressent. La pauvreté dans les campagnes et la misère dans les villes sont difficilement supportables. Il faut un temps d’adaptation pour digérer tout cela. En fait, on ne digère pas, on prend juste un peu de recul pour se préserver et c’est assez dur.
Un peuple chaleureux.
Nous n’avons jamais ressenti aucune agressivité à notre encontre, et ne nous sommes jamais senti en danger, même lorsque nous nous promenions seuls dans les villes ou dans les marchés surpeuplés. En qualité d’étrangers, nous suscitons plutôt de la curiosité. Beaucoup de jeunes femmes viennent nous voir pour faire une photo. Elles demandent presque systématiquement à Sylvie. Le contact est amical et l’ambiance détendue, les Indiens sont d’une gentillesse incroyable et sont très chaleureux avec nous.
Pas de panique, même sans être des spécialistes de la langue anglaise, nous nous sommes très bien débrouillés. Nous avons même pris des fous rires devant les yeux interrogatifs de nos interlocuteurs, aussi perdus que nous. Nous finissions toujours par nous comprendre. Point n’est besoin de pratiquer un english so British, un petit dictionnaire de poche fait grandement l’affaire pour les mots usuels.
Qui sait, peut-être retournerons-nous un jour dans une autre région de ce vaste pays si accueillant pour une autre expérience moto ?
Norbert
28 décembre 2017 at 18 h 20 min
Magnifique, ce voyage dans les anciens états princiers de l’Inde. Des images spectaculaires d’une grande beauté et des commentaires dignes d’une agence de voyages avec en plus beaucoup d’humour. Un régal.
Sylvie et Bernard - Viens, on s'arrache!
28 décembre 2017 at 21 h 31 min
L’Inde est un pays vraiment fascinant. Merci pour votre commentaire enthousiaste et encourageant.
Michel
5 janvier 2018 at 17 h 23 min
Les photos sont vraiment magnifiques et vos commentaires nous donnent vraiment envie d’aller visiter ce continent que l’on ne connaît pas du tout.
Josie
7 février 2018 at 7 h 03 min
Genial tout cele me donne des « ailes » sitôt arrivee on a envi de repartir !!!!
kikimagtravel
28 mars 2018 at 18 h 32 min
Les photos sont MAGNIFIQUES! Ça fait un long moment que je m’intéresse à l’Inde, et à chaque fois que je lis des articles sur le sujet et ca me passionne toujours autant. Les routes doivent être effectivement dangereuses, vu tout ce qu’on y croise mais au moins le trajet n’est pas ennuyant!! Et le Taj Mahal?? il est sur ma Wishlist!! Les heures d’attente doivent être difficiles mais c’est clair ça doit être vite oublié quand on voit ces photos! Merci pour ces articles superbes!
Sylvie et Bernard - Viens, on s'arrache!
31 mars 2018 at 9 h 45 min
Le Taj Mahal porte bien son nom de « Perle de l’Inde », c’est tout simplement époustouflant de beauté. A voir absolument !
Hacquin
4 janvier 2019 at 13 h 16 min
Je comprends mieux le sens de prendre le temps de l’écriture à la découverte de votre commentaire. Si votre but était de donner envie de visiter l’Inde, c’est gagné.Bon reste l’appréhension à prendre l’avIon…. mais ceci est une autre histoire
Bravo pour la qualité du texte et des photos,ma prochaine visite sur votre site devrait m’amener sur la route 66
À plus et merci pour ce moment
Sylvie et Bernard - Viens, on s'arrache!
5 janvier 2019 at 14 h 18 min
Il est vrai que pour les destinations lointaines, l’avion reste incontournable. Aussi, nous sommes ravis de vous avoir fait voyager au pays des Maharajas !